
Jusqu’à début mars 2022, les notices rouges d’Interpol répertoriaient plus de 7.345 personnes de diverses nationalités dont l’Organisation internationale de police criminelle (Interpol) exige des forces de l’ordre du monde entier l’arrestation chaque fois qu’elles sont localisées, en attendant leur extradition vers l’autorité qui les réclame.
Parmi ces personnes figurent 15 ressortissants marocains qui ont été condamnés ou poursuivis pour divers crimes allant du meurtre au terrorisme, en passant par les agressions armées, l’enlèvement et le trafic de drogue.
Les personnes recherchées d’origine marocaine occupent, en nombre, le deuxième rang parmi les personnes recherchées originaires du Maghreb, après les ressortissants algériens (16), et sont suivis des Libyens (7) et des Tunisiens (5).
Saïd Bahaji: “l’expert Internet” de la cellule de Hambourg, responsable des attentats du 11 septembre
Il est le Marocain le plus recherché par Interpol. Natif d’Allemagne, Saïd Bahaji est sous le coup de lourdes poursuites, notamment pour appartenance à une organisation terroriste et complicité pour meurtre dans 246 affaires. Le nom de Saïd Bahaji a fait le tour du monde au lendemain des attentats terroristes du 11 septembre. Il était membre de la “cellule de Hambourg”, qui comprenait certains des auteurs des attentats contre le World Trade Center à New York.
Said Bahaji est né en 1975, dans la ville de Haselünne, une petite ville de la Basse-Saxonie (Centre-Est), d’un père marocain et d’une mère allemande.
Sa famille déménage au Maroc lorsqu’il a neuf ans, mais il retourne en Allemagne en 1995 et s’installe à Hambourg où il s’inscrit en génie électrique dans une université technique.
Selon des informations de presse, Saïd Bahaji aurait été engagé dans l’armée allemande pendant cinq mois, avant d’être démobilisé pour des raisons médicales. En 1998, il emménage avec les futurs pirates de l’air Mohamed Atta et Ramzi bin al-Shibah dans un appartement à Hambourg qui verra la naissance de la “cellule de Hambourg”. Bahaji fut, apparemment, l’expert Internet du groupe.
Aux côtés de Ramzi bin al-Shibah, Said Bahaji a été accusé de 5.000 meurtres par le gouvernement fédéral allemand. Bin al-Shibah a été arrêté le 11 septembre 2002, mais la trace de Bahaji a été perdue depuis qu’il a quitté l’Allemagne jusqu’en octobre 2009, date à laquelle son passeport allemand a été retrouvé dans une ville afghane.
En août 2017, a été relayé le contenu d’un message audio du chef d’al-Qaïda, Ayman al-Zawahiri, annonçant la mort de “Zuhair al-Maghribi”, le surnom donné par l’organisation à Saïd Bahaji, sans donner de détails sur les circonstances ou le lieu de son décès. Pourtant, son nom figure encore sur la liste des notices rouges de l’Interpol.
Zakaria Essabbar: Empêché par un refus de visa de devenir l’un des kamikazes du 11 septembre
Un deuxième Marocain a trouvé une place dans la liste internationale des personnes recherchées par l’Allemagne dans le cadre de la cellule de Hambourg. Il s’agit de Zakaria Essabbar, qui a fait son entrée dans les notices rouges le 30 septembre 2002, en tant que personne associée à Al-Qaïda, à Oussama ben Laden ou aux talibans.
Berlin le poursuit spécifiquement pour “avoir participé au financement d’actes ou d’activités menées par Al-Qaïda ou y avoir été associé, oeuvrer en son nom, l’appuyer à projeter ces actes ou activités ou faciliter leur exécution ou leur préparation”.
Né le 3 avril 1977 à Essaouira, Zakaria Essabbar s’est rendu en Allemagne pour poursuivre ses études dans le domaine de la biotechnologie. Selon des fuites médiatiques, Ramzi bin al-Shibah aurait révélé lors de son interrogatoire que c’était Essabbar qui avait porté un message aux dirigeants d’Al-Qaïda annonçant la date des attentats du 11 septembre 2001. Selon ce qui a été rapporté par plusieurs sources en 2005 et attribué également à Ibn al-Shibah, Essabbar ignorait le contenu et la signification du message à l’époque. Il était également censé faire partie du groupe qui allait mener ces attaques, mais son visa pour entrer sur le territoire américain avait été refusé.
A l’instar de Said Bahaji, Essabbar a quitté l’Allemagne peu avant les attentats du 11 septembre et tout comme son compatriote, des informations de presse l’ont donné pour mort en Afghanistan, sans que cela puisse amener Interpol à le retirer de ses notices rouges.
Rachid Bouazza: le baron de la drogue qui a inondé la Belgique de cocaïne
Le baron de la drogue Rachid Bouazza est considéré comme l’un des criminels les plus recherchés par les autorités belges, et a été inscrit sur la liste noire belge des “Most Wanted” qui comprend 20 criminels.
Né le 6 octobre 1967 à Tanger, Rachid Bouazza avait été condamné en 2013 par le tribunal de première instance de Bruxelles à quatre ans de prison pour trafic de drogue.
Cet immigré marocain en Belgique est accusé par la police fédérale belge d’avoir inondé le pays de grandes quantités de cocaïne en provenance de la République dominicaine via le port d’Anvers.
Alors qu’il est toujours en fuite, la Cour suprême d’Anvers l’a condamné par contumace, le 28 mars 2019, à une peine de 20 ans de prison ferme, alourdissant une ancienne sentence rendue le 17 mai 2013 par le Tribunal de première instance de Bruxelles, qui l’avait condamné à 4 ans de prison.
Des Marocains recherchés à cause de crimes isolés
Ce n’est pas parce qu’une personne apparaît sur une notice rouge d’Interpol qu’elle faisait partie d’un projet criminel connu du public, comme dans le cas de complots terroristes ou du crime organisé et transfrontalier.
Certains Marocains dont les noms figurent dans ces listes sont recherchés par des autorités locales de sécurité après avoir commis des crimes isolés avec des mobiles purement personnels, puis ils sont restés dans l’ombre, malgré la coloration de leurs noms en rouge. Parmi ceux-ci se trouve Mohamed Aissa, né le 8 août 1973 à Schaerbeek, en Belgique, accusé de vol à main armée, de cybercriminalité et de vol en bande organisée.
Il a été condamné à perpétuité le 16 septembre 2014 par la cour d’assises de Bruxelles. Le 20 mai 2011, deux personnes ont commis un vol avec violence dans un appartement situé rue de la Montagne à Bruxelles. Suite à cette agression, la victime est décédée de ses blessures. L’enquête a permis d’intercepter un des auteurs. L’autre, Mohamed Aissa, a pu s’échapper. Les enquêteurs ont identifié le complice de Mohamed Aissa, Hassan Hammou Touzani, après la découverte de papiers d’identité en son nom dans le sac d’une caméra que les agresseurs ont laissé sur place. Des témoins l’ont également identifié, mais les services de sécurité belges n’ont pas pu mettre la main sur Aissa, qui est toujours en cavale.
Une seule femme dans la liste
En Suède s’est déroulée l’histoire de la seule femme marocaine qui fait l’objet d’une notice rouge d’Interpol. Il s’agit de Bouchra Lalami, née en septembre 1961 à Rabat, qui a immigré en Suède et s’y est mariée. En juillet 2010, le mari de la Marocaine, qui était âgé de 55 ans, est retrouvé mort dans des circonstances mystérieuses à l’intérieur de leur appartement.
On a d’abord cru que la mort était naturelle, mais les résultats de l’autopsie ont révélé la présence d’un morceau d’éponge qu’on avait pressé dans la gorge de la victime.
Depuis lors, l’épouse marocaine a disparu de la vue et son nom est apparu sur la liste d’Interpol après que les autorités judiciaires ont émis un mandat d’arrêt international à son encontre.
Le site d’Interpol comprend une longue liste de suspects recherchés par l’organisation policière internationale en vue de leur extradition aux pays qui les demandent. Derrière chacun de ces noms se cache une histoire, dont certaines peuvent être connues au regard de la notoriété de leurs auteurs, des actes qui leur sont reprochés ou dont ils sont accusés, tandis que d’autres vont rester inconnues à l’image de leurs auteurs qui ont été contraints, par un concours de circonstances, à commettre l’irréparable et à disparaître pour de bon.
En somme, les histoires de certaines des personnes recherchées demeurent plus compliquées que ce qu’en révèlent les notices rouges d’Interpol, qui se contentent d’en indiquer le nom, la date de naissance, la nationalité et la couleur de cheveux et des yeux, rien de plus.